Et si on n'allait pas aux rassemblements sportifs sur sites naturels

L'an dernier, pour le magazine Grimper, notre rédacteur en chef, Greg Clouzeau avait publié une Tribune intitullée, "le changement, c'est maintenant" à propos des grands rassemblements internationaux de grimpeurs en site naturels. Le temps des grandes migrations est revenu. Melloblocco fête sa dizième édition. Il y a aussi Annot, Millau, Kerlouan, Kalymnos...
Les marchands du temple sont de retour et, malgré l'aspect festif et super convivial de ces évènements, à la TL²B on ne peut s'empêcher de penser qu'il ont un impact significatif sur les sites naturels où ils se déroulent mais aussi sur la planète...


L'article de Greg dans Grimper commençait comme cela :
"Avec les beaux jours, les grimpeurs sortent des salles. C'est l'occasion de découvrir l'essence même de notre pratique : le rocher, le vrai, le naturel, celui pour lequel certains passent des heures et des heures à bourriner sur la résine.

Cela commence à Pâques avec la migration de milliers de bloqueurs vers le plus célèbre spot du monde : Bleau. Cette invasion qui, depuis plus de dix ans, prend d’avantage d’ampleur chaque année, laisse des traces qu'une poignée de locaux tentent d'effacer à coup de Clean Up Day et d'opérations de lutte contre l'érosion ! [...] En Mai, c'est les fêtes de la nature mais aussi celui des grands rassemblements internationaux de grimpeurs…

On débute avec Mellobloco chez nos compatriotes italiens. Ce magnifique spot s’est transformé en Woodstock de l'escalade avec plus de 2700 inscrits et autant de parapluies ! Ambiance grimpe, émulation, peace and love. Mais, malgré tout le soin apporté par les organisateurs (toilettes, parking, covoiturage, charte…), la nature en subit les conséquences ! Comment imaginer que plus de 2 000 grimpeurs et 10 000 observateurs puissent circuler dans un chaos rocheux pendant 3 jours sans que l'érosion n’y soit fortement augmentée ? Heureusement pour eux, le sol transalpin est solide ! L’an prochain, ce rassemblement fêtera son dixième anniversaire mais les traces des éditions précédentes auront-elles disparues ?

Source  Petzl Italie

Retour en France pour Annot à Bloc, mi-mai ! L'événement est certes plus confidentiel mais le site est beaucoup plus fragile et les autorisations de grimper dans certains secteurs ne supporteraient pas les écarts de conduites de certains… Soyez respectueux du site et de ses propriétaires car la Mairie a beau être organisatrice de l'événement, elle ne pourrait pas empêcher un propriétaire d'interdire l'accès à ses terres.

Contest à Annot
Source : Annotabloc
Y a aussi les Natural Games à Millau, qui n'ont de naturel que le support et qui sont bien, là encore, une grande fête des consommateurs de cailloux poussés par les industriels de la grimpe. On pourrait multiplier les exemples à foison et ils nous conduiraient sans aucun doute, d'un bout à l'autre de la planète, c'est à dire de Kerlouan en Bretagne où la mer à l'avantage d'effacer nos traces jusqu'à Kalymnos, une ile grecque en pleine crise économique, qui survie grâce aux grimpeurs mais où l'écologie n'a pas encore gagné ses lettres de noblesse comme en témoigne les déchets sur les rivages.

Bref, si tous ces rassemblements sont autant d'occasion de faire la fête, de partager de bons moments, voir de faire découvrir les sites naturels  aux plus jeunes grimpeurs, ce sont avant tout des temples du consumérisme et une planche de salut pour certaines communes en mal de touristes et de notoriété. Mais ce sont surtout une négation de l'écologie et du green climbing ! Ah, il doit être beau le bilan carbone de ces manifestations ! Et si encore, ils étaient l'occasion de nettoyer les sites, d'y aménager des ouvrages de lutte contre l'érosion, ou d'y effacer toutes traces de magnésie ?

Bref, si « le changement c’est maintenant », il est temps de s’y mettre ! Car les bénévoles qui ramassent, construisent, préservent, etc. sont trop peu nombreux et fatigués. Grimpeurs, grimpeuses, devenez de vrais consommacteurs. Assurez – vous que demain encore vous pourrez goûter aux joies d’une activité de pleine nature en adoptant la Climbing Attitude, celle qui consiste à respecter la nature, minimiser l'impact de sa pratique mais aussi à respecter les propriétaires et les réglementations pour préserver notre liberté de grimper. "

Rien n'a vraiment changé depuis à part les dates des manifestations !


On commence dès demain avec la 10ème édition du célèbre rassemblement international de bloc italien se (26 avril au 5 mai) à Val Masino.  Comme chaque année, des milliers de grimpeurs y sont attendus. Comme d'habitude, contest sur blocs naturels, multitude d'animations et de festivités sont au programme.  Le Melloblocco est devenu une véritable institution. C'est le plus grand rassemblement de bloc au Monde et même avec une météo pourrie, il a réuni pour la dernière édition plus de 2700 grimpeurs issus de 22 pays différents et attiré dans la vallée quelques 10 000 curieux !  Cette année, ce n'est pas 4 mais 10 jours de fréquentation ! Puis début juin, c'est sur les grès du sud d'Annot que nous irons. On ne va pas tous les lister ici et maintennant. A Bleau, une centaine de jeune grimpeurs se retrouveront à Buthiers sous la banière de la FFCAM pour la deuxième édition de Camp 4 (voir notre article sur la TL²Bleau).



Voilà, voilà...
Certes ces évènements sont the place to be et une excellente occasion d'échanger avec les autres et de découvrir ou faire découvrir le rocher, le vrai, mais bon, ayez juste à l'esprit qu'en y allant, en y participant, vous contribuez à la dégradation du site. Heureusement vous participez aussi au développement de l'économie locale ! Après c'est une question d'équilibre et de compensation...

Alors, faite un geste, sur place ramassez au moins les déchets !



Les sites des organisateurs :

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14 commentaires :

  1. Salut a tous
    15000 sur la randonnée des 3 Châteaux 2013

    ce n'est pas une connerie ? qui coute cher au contribuable !

    Yves
    Bye

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  2. Au delà des impacts environnementaux, ce qui m'agace dans ce type d'évènement c'est l'image "cool", alternative, festive que cherchent à faire passer les organisateurs pour attirer les jeunes, alors que les enjeux sont tout autres : commerciaux, touristiques, fédéraux...et beaucoup de jeunes tombent dans le panneau avec bien peu d'esprit critique. C'est le même type de manipulation que l'on retrouve dans l'esprit "street", rebel des contests de skate, dont on retrouve les comptes rendus dans de luxueuses revues en papier glacé bardées de publicités...Finalement les finalités des compétitions fédérales traditionneles me semblent beaucoup plus transparentes. Hervé DELACOUR

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  3. Dans les impacts environnementaux, ne pas négliger les milliers de kilomètres parcourus pour aller sur le site du rassemblement, en général toujours en voiture et/ou en avion (cf les derniers rassemblements en... Argentine et en Chine).
    Concernant la remarque que Hervé, tu verrais ça comment? Façon Football? Façon Tennis? Façon GMHM?
    Oui il y a du commerce et du tourisme, comme partout, mais à la fin c'est autant de jeunes et vieux qui vont passer la journée dans la nature, et ça, on ne peut pas nous le piquer.

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  4. La remarque d'Hervé est pleine de bon sens. Il n'y a rien de mieux que les grands rassemblements afin de manipuler les masses. L'émulation collective, ça commence à 2! Pour se dépasser et se comparer, rien de mieux que la compétition. Si vous éprouvez de savoir si vous êtes le meilleur, mettez un dossard. Le meilleur grimpeur du monde sur un jour est le champion du monde et le meilleur sur une saison est le vainqueur de la coupe du monde, point barre.
    Pour simplement se dépasser, appuyer vous sur vos potes, sur les gens rencontrer sur le spot. Besoin de conseils? Les locaux sont là, ils seront meilleurs que des conseillers technico-commerciaux. En petit comité, vous êtes discrets, vous respecter les autres usagers, vous ne déranger pas la faune et la flore.
    Il existe 2 endroits mythiques et magiques, prénommés Verdon et Buoux. L'escalade y est grandiose, le lieu enchanteur. Des rassemblements s'y déroulent mais hors WE de mai, peu de chance d'y voir foule. Ces lieux sont à vous.

    L'escalade comme expression d'une liberté? Alors ne vous laissez pas dicter les règles d'un jeu qui n'est que celui que vous avez décidé d'inventer.

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  5. A mon avis tes propos ne sont pas assez nuancés, entre le rassemblement d'Annot et les Natural Mescouilles par exemple il y a un GOUFFRE. T'es tu déjà rendus à ces 2 évènements pour pouvoir comparer? Moi oui et les échelles sont complètement différentes en terme de fréquentation, budget, et surtout de l'esprit et de la convivialité.
    Après libre à vous de grimper en circuit fermé mais cela n'est pas la vision de tous les grimpeurs. La modernité peut être une avancée, elle doit l'être même en théorie.

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  6. Bonjour,
    merci à tous pour vos commentaires. Vous l'avez compris, nous cherchons juste à susciter le débat et au passage, remerçions ici tous les bénévoles qui s'impliquent dans ces manifestations.

    Certes, Fred, on ne peut mettre sur le même plan Mello, Milleau et Annot. Les budgets et les impacts ne sont pas les mêmes. Mais même un petit évènement à Annot peut avoir des conséquences importante en terme d'environnement.

    Annot, c'est un peu comme Bleau : un site très fragile en terme d'érosion. En plus, c'est un site sensible en terme d'autorisation. Y attirer sans cesse plus de monde est bon pour la commune et le tourisme local mais faudrait pas que dans dix ans on soit obligé de construire des barrière anti érosion et fermer les secteurs les plus atteints.

    Bref, cet article est juste là pour faire réflechir à notre avenir et nos démarches. Chacuns est libre d'agir en conséquence.

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    1. Annot n'est pas très comparable à la situation de Bleau: Annot c'est loin de tout, et ça le protège plutôt bien. Il peut y avoir du monde sur un secteur lors d'un événement ponctuel mais, après, le reste de l'année, si tu cherches la paix, tu l'as. De plus, on arrive à un stade où l'offre de blocs dépasse la demande.

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    2. Bonjour,
      merci pour vos commentaires.
      Vous avez raison en terme de fréquentation. Le site est par contre très similaire en terme de sensibilité des sols à l'érosion. Donc à l'heure actuelle c'est effectivement un petit paradis. Souhaitons juste qu'il le reste et ne devienne pas un spot à la mode !

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  7. Salut,
    pour aller plus loin que toi,et même si ce n'est pas cool à dire, les sports de pleine nature sont ils compatible avec la democratisation au plus grand nombre.
    Quand tu vois des sites victimes de la world climbing, de leur envahissement par les campings car et autre bivouac sauvage, l'impact sur l'environement, le rocher. Je me prends à regretter le coté élitiste et intimiste des debut ou c'était un copain d'un copain qui t'initier.
    Mais bon après 30 ans de pratique c'est mon coté vieux con qui doit ressortir.

    Lionel

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    1. Bonjour,
      merci Lionel, on se sent moins seul dans le club des vieux... En fait, plus on vieillit, plus on découvre ce lien étroit de notre activité avec la nature et ses impacts. Dommage qu'il faille autant de temps pour en prendre conscience.

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  8. Toutes ces réflexions touchent selon moi l'évolution de notre pratique et les dérives qui s'en dégagent: massifier, démocratiser, rassembler, OUI mais pas à n'importe quelles conditions, ni conséquences. De ce fait, je rejoint plutôt le camp des sceptiques, ou des prudents quant à l'impact écologique. A cela peut se rajouter parfois la méconnaissance du milieu, du respect de certaines règles (propreté, silence, brossage, piétinement...) qui ne sont pas toutes intégrées par une nouvelle génération de grimpeurs (euses). A nous, passionnés, expérimentés, lucides (enfin j’espère) de former (si on en a l'occasion), de sensibiliser tous ces pratiquants sur les conséquences de leur pratique, dans le respect de ce qui fait l'essence de l'escalade: grimper sur du caillou, avec des potes, en préservant, au mieux, le support.
    Seb

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    1. Bonjour et merci pour cette contribution Seb.
      C'est tout à fait ça.

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  9. C'est sur que l'escalade est une pratique qui détériore l'environnement. Détériorer le rocher et laisser ses déchets sur un site est une chose, mais le plus inquiétant est le bilan carbone de la pratique. La plupart des grimpeurs voyage beaucoup pour faire la voie de leurs rêves et visiter les sites les plus classes autour du monde. Quand on regarde les stars telles un Sharma, Ondra ou Graham, ils passent leur temps à voyager pour faire des croix. C'est polluant certes mais il faut vivre avec son temps.

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    1. Bonjour et merci
      100 % d'accord si ce n'est que vivre avec son temps doit pouvoir se refuser et être compenser... Pour vivre avec son temps est-ce obligatoire de choisir les OGM, l'exploitation du pétrole et gaz par fracturation hydraulique, les pesticides... ?
      On doit pouvoir refuser et trouver d'autres alternatives. Mais c'est compliqué.
      Bien à vous amis du Verdon.

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