
Il y avait bien longtemps que l'on n'avait pas poussé un gros coup de gueule contre le Parc National des Calanques et ses gestionnaires ! En fait, c'est même un coup de gueule contre l'administration et son application bornée (pour ne pas dire autre chose) de réglementations, dans une logique écolo et sécuritaire "jusqueboutiste" mais qui, en cas d'accident, pourrait bien se retourner contre elle. Les Calanques c'est sans aucun doute l'un des plus beaux sites d'Europe pour pratiquer la montagne au bord de la mer. Un site d'escalade qui s'est forgé une solide réputation internationale décennie après décennie et ce depuis plus plus d'un siècle, mais sans cesse remise en cause par les gestionnaires du PNC comme ce fut le cas dès sa création mais aussi en 2016. Nous avions averti, la création d'un PN c'est la fin de la liberté de pratiquer ses loisirs de pleine nature (voir le cas du VTT). Ces dernières semaines, les employés de PN n'ont rien trouvé de mieux que de poursuivre en justice certains professionnels et équipeurs des falaises...
Alors nous le réaffirmons, Monsieur de Directeur du Parc National des Calanques, vous vous trompez de cibles ! Randonneurs, grimpeurs, vététistes... sont avant tout des amoureux d'espaces naturels pour lesquels ils sont tout à fait prêts à s'investir dans la protection ! Occupez-vous plutôt des boues rouges et laissez les professionnels de la montagne faire leur travail de sécurisation des Sites Naturels d'Escalade des Calanques.
Si comme nous, vous êtes passionnés d'escalade, vous connaissez forcément les magnifiques falaises de calcaire des Calanques qui se jettent dans l'azure.
Une longue histoire qui débute par l'ascension en 1879 du sommet de la Grande Candelle par le consul britannique Francis W. Mark. Dès cette époque, elles deviennent un terrain d'entrainement à l'alpinisme pour les Excursionnistes marseillais puis le Club alpin. Dès 1900, les principaux sommets et aiguilles sont gravis : rocher des Goudes (1900), aiguille de Sugiton (1903), aiguille de Sormiou (1904). Dans les années 1920 de grandes voies sont ouvertes le long des grandes fissures et des arêtes, telles l’arête de Marseille (1927) ou l’arête de la Cordée (1928). Suit ensuite une très longue liste de premières par des alpinistes célèbres et indissociables de l'histoire des Calanques :
Édouard Frendo (1910-1968),
Gaston Rébuffat (1921-1985),
Georges Livanos (1923-2004)... Après les années "alpines", l'escalade devient sportive et là encore, de grands noms de l'escalade française s'illustrent dans la conquête des surplombs des Calanques : comme
Patrick Edlinger dans
Nymphodalle (7c, en 1979), jusqu'au neuvième degré avec
François Legrand dans
Robi in The Sky (9a, 2000). Avec quelques 3 400 voies répertoriées (2 400 sportives et 1 000 dite terrain d'aventure), les Calanques sont aujourd'hui encore l'un des sites d'escalade les plus prisés et fréquentés du monde ! Un patrimoine difficile à entretenir et sécuriser aussi, le sel marin ne faisant pas bon ménage avec les équipements installés à demeure.
Si depuis 2012 et la création du parc national on peut sans doute comprendre et accepter qu'il y ait une interdiction d'équiper de nouvelles voies et des mesures de restriction d'accès (érosion, nidification...), il est dangereux, de vouloir limiter les travaux d'entretien des voies existantes par des professionnels de la montagne.
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Equipement à Cap Canaille, crédit Guy Abert |
Ainsi, il y a quelques semaines, Guy Abert, célèbre grimpeur, équipeur, guide et
photographe, nous a alerté sur ses mésaventures avec le PNC et sa direction :
"Récemment le Parc des Calanques a fait une razzia en prenant plusieurs équipeurs dans les Calanques. (...) Je me suis fait prendre aussi au Cap Canaille. (...) Si tous les pratiquants des Calanques montaient au créneau : randonneurs, vététistes, grimpeurs, spéléo, plongeurs, Kayakistes etc ... le problème serait de fait vite réglé.
Il faut rien lâcher, ils viennent d’interdire des secteurs au Devenson, à Castelviel, au Canceou et le Cap canaille est visé ainsi que d’autres secteurs, de décembre à juin. Ici, le motif s'appelle Faucon Pèlerin ! (...)
Au Cap Canaille au niveau du "Parking des Calanques", le Parc a changé une douzaine de poteaux en bois avec fil de fer qui délimitent une zone de non piétinement pour préserver l’érosion du sol et la flore, ils ont jeté les vieux poteaux avec fil de fer. Ils sont maintenant en bas au pied de la falaise, secteur Ouvreurs de Bouses. Pourtant, a quelques mètres de là il y avait le ‘ musée ’ : un parterre de petites sculptures de 15 cm qui faisait parti du patrimoine des Calanques, et qui est maintenant démoli ! Ils ont bien entendu laissé en place les carcasses de voitures, de motos, frigidaires, machine à coudre etc... qui complètent le tableau ! (...) Quant aux chasseurs, ils arpentent eux le pied des falaises de Cap Canaille en quasi liberté.
Considéré comme un délinquant, un voyou, le directeur du parc m’envoie au tribunal pour 3 pitons plantés dans la roche !! "
Il s'explique aussi depuis début mai dans une vidéo
Qu'a donc bien pu faire Guy pour se retrouver face à la justice ?
Il a équipé une nouvelle voie sans autorisation et se retrouve donc poursuivi en l'application de la réglementation sur les « travaux » interdits dans un PN et risque une condamnation identique à celle d'une construction illégale. Comme l'a si bien dit Marc Chabert, "cela relève un peu de l'emploi d'un marteau-pilon pour tuer une mouche..." !
Un cas isolé ? Eh bien non ! Selon nos informations,
quatre autres équipeurs/rééquipeurs dont Bruno Clément alias Graou ont également été inquiétés par les gardiens du PNC avec matériel confisqué, amendes et, parfois, dépôts de plainte au tribunal de la part du parc national des Calanques.
Rappelons donc aux autorités du PNC que les travaux des équipeurs-grimpeurs sont aussi destinés, à la sécurisation des sites d'escalade et de leurs pratiquants. Restreindre la liberté de changer un ancrage pourri par le temps par un scellement neuf, c'est un peu s'opposer à la mise aux normes de l'équipement. En fait, ce faisant, la direction du PN nous met purement et simplement en danger !
Le parc, dans sa folie administrative (phobique s'abstenir) veut, comme toujours, exercer son pouvoir en maître absolu qui n'y connaît pourtant rien. Euh, petite question, Monsieur le Directeur. Vous avez un juriste dans votre équipe ? Parce que se passera-t-il en cas accident sur un défaut de maintenance d'un ancrage ? Qui sera tenu pour responsable ? A l'heure où
la FFME lutte pour un changement de la Loi sur la responsabilité des gestionnaires de falaise, la justice cherchera très certainement à comprendre pourquoi le PNC a empêché un Guide, professionnel aguerrit, d'intervenir avant l'accident ! Rappelons qu'ici la majorité des falaises appartiennent à des instances publiques, qui risquent donc de subir directement les conséquences d'une application bête et méchante d'une réglementation par la direction du PNC. Amis élus marseillais et autres décideurs, planquez-vous ! De là à penser que les dirigeants du PNC organise l’obsolescence des équipements de sécurité des falaises pour se débarrasser d'une certaines fréquentation des Calanques...
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Escalade dans les Calanques, Greg Clouzeau |
Si depuis quelques décennies, la très grande fréquentation des falaise n'a pas généré d'accident graves en escalade en dépit des risques inhérents à la pratique c'est dû essentiellement au travail des ouvreurs et des grimpeurs qui (r)équipent les voies anciennes et nouvelles. Les grimpeurs français et étrangers ne vont pas cesser de venir parcourir nos falaises et l’important est qu’ils le fassent dans de bonnes conditions. Non ?
Puisque réglementation il y a, il est possible de considérer les interventions des guides et autres équipeurs professionnels comme celles qui sont soumises à l'autorisation du directeur du Parc : « ayant pour objet l'extension limitée d'équipements d'intérêt général ou leur mise aux normes, sous réserve de ne pas porter atteinte au caractère du parc ; ayant pour objet l'aménagement et l'entretien des espaces, sites et itinéraires destinés à la pratique des sports et loisirs de nature non motorisés ».
Bref, nous invitons la communauté de l'Outdoor à réagir vivement auprès du Parc et de son directeur mais aussi à interpeller les élus et décideurs locaux !
En attendant, cette histoire n'est pas sans nous donner à réfléchir sur la politique d'accueil actuelle de l'ONF Fontainebleau. Ici aussi, en raison d'une extrême "sensibilité" des responsables, certains travaux habituellement effectués par des bénévoles passionnées ne peuvent plus l'être sans conventions, autorisations et autres lourdeurs administratives qui prennent bien trop de temps. Ne soyez donc pas surpris si certains tags sauvages restent visibles pendant des années ou sir certains circuits d'escalade ne sont plus entretenus... Quant à l'ouverture de nouveaux blocs... prudence ! Elle peut être qualifiée de "destruction d'espace naturels" selon un article de Gaëtane Hay, Responsable du service "Accueil et biodiversité" à l'agence ONF IDF est, (La forêt de Fontainebleau, un terrain de sport à ciel ouvert) publié dans le bulletin de l'Association des amis de la Forêt de Fontainebleau (n°80 juin 2017)