Délire Editorial

Si les publications sur ce portail dédié à la Cordée de Rédaction de la TL²B se font de plus en plus rares c'est sans doute parce que nous avons tous mieux à faire... et notamment, en ce qui me concerne, une fois par mois, pondre une Tribune de 3900 signes pour le magazine Grimper que son Rédac' Chef, Fred Labreveux souhaite "à charge". Cette tâche, dont je m'acquitte depuis bientôt deux ans me vaut parfois quelques mails bien sympathiques mais aussi de vives critiques. Alors, quand celles-ci viennent directement du Rédacteur en chef de Grimper... je m'interroge ? En effet, suite à quelques remarques d'un ami bleausard que je ne comprenais pas,  j'ai foncé chez le marchand de journaux ce matin pour lire l'Edito de Fred dans le n°157... Et là, surprise, "mon" Rédac' Chef me taille un costard en me prêtant des idées qui ne m'auraient même pas effleuré l'esprit.


Voici donc l'Edito du Grimper n°157...


Commençons par cette histoire de désherbant. 
Voici donc une image prise à Annot dans la zone du rassemblement 2014 sur indications d'un propriétaire... 



Mais soyons bien clair. Que se soit à Annot où ailleurs, ça change quoi Fred ? Rien ! 
Alors pourquoi lancer cette comparaison complètement stupide entre Annot et Bleau qui, au passage, va à l'inverse des propos de ma Tribune ? Quant aux trois raisons qui feraient selon toi que la mousse repousse plus vite là-bas...

1° la mousse et les lichens poussent très bien à Bleau vu le climat ! Par ailleurs, je ne suis pas inquiet, je connais dans cette forêt, des dizaines de site bien plus moussus que tu peux l'imaginer depuis ton sud.
2° le 8c et la poignée de grimpeurs qui s'y frottent serait selon toi la clé de la popularité de Bleau.  Allez, juste pour prendre un exemple dans ma Tribune et dans le sud, crois tu sincèrement qu'Orpierre a attendu d'avoir son 8c pour devenir le site de renommé international au succès économique que l'on connait ?
3° pas de circuit à Annot. Tant mieux pour eux ! Cela fait aussi moins d'érosion... Mais en même temps, cela peut vite changer vu les volontés de la Municipalité de faire d'Annot un site populaire et familiale. Je ne serai donc pas surpris que des ouvreurs locaux propose un circuit pour enfant et un circuit de découvert dans les mois qui viennent.

Alors, Fred, rassures toi, nos mousses vont bien y compris au cœur des sites les plus fréquentés. Tiens, regardes, à quelques mètres du Surplomb de la Vallée de la Mée (Potala) dans l'aride et désertique forêt domaniale des Trois Pignons !



Pour vous permettre d'en apprécier l'honnêteté rédactionnelle de l'Edito de Fred à sa juste valeur, je me dois de publier le texte de ma Tribune tel qu'il fut envoyé à Grimper :

Ouvrir… mais à quel prix ?

Les grands rassemblements en sites naturels sont autant d’occasion de faire la fête, de promouvoir nos activités, de découvrir de nouvelles voies équipées pour la circonstance… que de dégrader massivement un site.

En 2013, à travers diverses Tribunes dans Grimper je soulignais certains de ces impacts négatifs  en évoquant le triste bilan carbone de nos trips internationaux ou la nécessité d’organiser des Clean up Days à Kalymnos, pour ramasser nos déchets sur une Ile jusqu’ici peu fréquentée. Il y a aussi l’accroissement du phénomène d’érosion qu’entraîne inévitablement la présence de milliers de grimpeurs et de spectateurs lancés à l’assaut d’un chaos de blocs dans la boue et sous une pluie battante comme lors des dernières éditions de Mello Bloco. En falaise, bien entendu, une surfréquentation entraîne aussi inévitablement une dégradation. Le rocher se patine, les sentiers se creusent, le pied des voies se transforment…

Mais après tout, c’est le prix qu’ont choisit de payer les municipalités concernées pour faire de leurs rochers le dernier spot à la mode comme leur a promis les organisateurs de l’évènement. En pleine crise économique, peut-on blâmer quelques élus de vouloir exploiter la nature pour faire vivre leur commune ? Cette utilisation d’une ressource paysagère « naturellement inutile », n’est-elle pas, finalement, une forme d’agriculture moderne ?

C’est en tous cas dans cette optique que l’exploitation des falaises d’Orpierre (05) avait repris dans les années 80. J’écris « repris » car, plus avant, elles ont été utilisées pour l’extraction de minerais ce qui a laissé bien plus de traces dans le paysage que nos pauvres sentiers de marche d’approche et quelques points d’ancrage. C’est aussi comme cela qu’une commune comme Vauchignon (voir l’article sur Cormot, en Bourgogne) peut faire vivre quelques habitants du tourisme. Oui mais, comme dans l’agriculture, prenons garde à ne pas tomber dans la surproduction, la surexploitation, l’industrialisation…

Trouver plusieurs centaines de nouveaux passages dans un site de blocs pour organiser une énième rencontre internationale suppose d’avoir le potentiel rocheux, d’en avoir la maîtrise du foncier et, dernier point, d’y organiser l’accueil (du stationnement à l’approche en passant par l’hébergement, le nettoyage et sécurisation du site). Et là, avec ces trois conditions, les choses peuvent vite déraper !

Ainsi, à Bleau, la petite commune de Mondeville (Essonne) qui souhaitait faire de son chaos rocheux (fréquenté depuis les années 50) un site exemplaire de la pratique de l’escalade a visiblement mis la charrue avant les bœufs ! En effet, ce n’est qu’après y avoir été invité par la municipalité que nos grimpeurs bénévoles  lancés dans le nettoyage et la remise en état du site pollué par plusieurs Raves party se sont trouvés confrontés aux véritables propriétaires du site : les chasseurs ! Du coup, le site tout propre est quasi interdit et les rapports sont maintenant assez conflictuels.

Mais il y a pire… Pour ouvrir en masse, et tenir les délais, certains n’hésitent pas à user de moyens dont l’impact sur la nature est conséquent ! Et tant que l’on y est, on fait ça en plein ENS ou réserve biologique… Oui, chers amis, il y a parmi nous des grimpeurs qui se disent respectueux de la nature mais qui n’hésitent pas à pulvériser désherbant et anti-mousse sur les blocs pour faciliter leur nettoyage ! Que voulez-vous, brosser une soixantaine de cailloux demande du temps et beaucoup d’huile de coude alors, si on peut se faire aider d’un quelconque défoliant… quitte à sacrifier un peu à la notion de développement durable. Que voulez-vous, c’est pour le développement économique du site !

 « Il y avait des plantes et insectes protégés ? Ah bon, je ne savais pas »… Jusqu’à l’arrivée d’internet, on pouvait encore prétendre être ignorant de certaines choses mais maintenant. Bien entendu, cette entorse à l’éthique ne sera pas mentionnée dans le topo ou sur l’affiche du rassemblement … Comme sur la carte de certains restaurateurs en quête d’argent, le « fait maison » n’est hélas parfois qu’une tromperie… Nous voilà donc bernés.

Les bénévoles associatifs représentants les grimpeurs ont souvent bataillé dur avec les ceux des lobbies naturalistes pour que les informations sur les espèces protégées soient plus accessibles. Par exemple, les documents d’objectifs (DOCOB) des sites natura 2000 sont maintenant faciles à télécharger et permettent de savoir quelles plantes ou espèces protégées sont présentes sur un site. Un ouvreur devrait toujours y jeter un œil pour évaluer l’impact de ses projets.





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1 commentaire :

  1. J'avais effectivement été très surpris par la teneur de l'édito. Le problème soulevé n'était pas le fait d'enlever la mousse, mais d'utiliser du désherbant.
    Tout le reste de l'édito sur la volonté d’empêcher le développement de l'activité en dehors de Fontainebleau est vraiment débile. Le problème à Bleau comme ailleurs, c'est de respecter l’environnement en développant l'activité, thème que défendait l'article.
    Au surplus, Fred L. ne doit pas encore avoir entendu parler de l'effet Streisand (http://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Streisand pour les curieux) parce que, s'il n'avait pas dit dans son édito que le problème soulevé concernait Annot, beaucoup de gens l'auraient ignoré!

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