L’Année internationale de la biodiversité s'est achevée, laissant place à l’Année internationale de la Forêt. La nouvelle présidente, Liliane Pays, de l'agence régionale pour la nature et la biodiversité en Ile-de-France, Natureparif, a expliqué les prochains défis de l’Agence à la journaliste de DéveloppementDurable.com
Natureparif, c'est quoi ça ?
Natureparif, c'est quoi ça ?
Les Franciliens connaissent Airparif et Bruitparif. Ils ont maintenant Natureparif, la grande agence pour la nature et la biodiversité installée depuis le 30 juin 2008 rue de Grenelle dans le 7è arrondissement. Elle accompagne les élus en informant les franciliens des lieux remarquables de la région et de leur état de santé. Ceux qui n'habitent pas la Région Ile-de-France qui sert d'écrin au Pays de Fontainebleau ne voient souvent de notre région que l'image négative véhiculée par les médias, complétant une vision amalgamée d'une région fortement urbanisée à l'image de Paris et sa proche banlieu.
Vu de loin, on peine à croire que ce territoire compte quatre des Parcs Naturels Régionaux Français et près d'une quarantaine de réserves naturelles. Leur surface couvre même 14% de l'Ile-de-France ! Plus surprennant, les espaces naturels (y compris agricoles) occupent près de 80 % des terres franciliennes, les 12 millions de franciliens s'étant entassés dans les 20 % restant ! Les forêts, elles, couvrent près du quart de ces espaces naturelles. Mais l'urbanisation se poursuit et de 1982 à 1999 ces terres vièrges de toute construction ont reculées de 1 700 ha par an en moyenne ! Conséquence directe, la biodiversité de notre paradis est mise à mal et reste assez méconnue en dehors de Fontainebleau où elle est étudiée de longue date. On a recencé 228 espèces d'oiseaux sur les 375 observables en France. On estime à 18 000 le nombre d'espèces d'insectes, à soixante celles des mammifères, à dix-sept le nombre de reptiles, 12 d'amphibiens... Natureparif et son réseau suit la disparition de certaines espèces et va tenter de réduire leur nombre. Ainsi, peut être verra t'on revenir le saumon en Seine, les loutres dans la Bièvre ou le faucon pèlerin dans Paris. En favorisant la création de passages pour la faune reliant les anciennes grandes forêts aujourd'hui coupées par les routes, les populations devraient trouver de meilleures conditions pour leur reproduction dans les zones où elles sont en sous effectif. A l'inverse, de tels passages pourraient avoir de graves conséquences sur des populations aujourd'hui menacées comme notre brave écureuil roux chassé de la forêt de Sénart par son cousin gris. En plus, le tamia, d'origine coréenne, transporte avec lui un grand nombre de parasites telque la tique. Certains individus peuvent paraît - il en porter jusqu'à 500 ! En Seine et Marne, les autorités, devant le nombre croissant de cas de maladie de Lyme, ont mis en place un important dispositif de veille sanitaire.
L'interview :
"DeveloppementDurable.com : Vous êtes à la tête de Natureparif depuis le 9 décembre. Dans quel état d’esprit avez-vous conclu l’Année internationale de la biodiversité ?
Liliane Pays : J’ai eu l’occasion de constater, quand je suis rentrée en fonction, que cette Année avait été très importante. Le terme « biodiversité » a eu une plus forte résonnance, le grand public a pu s’en imprégner davantage et a pris conscience, par la même occasion, de la nécessité de la préserver.
Liliane Pays : J’ai eu l’occasion de constater, quand je suis rentrée en fonction, que cette Année avait été très importante. Le terme « biodiversité » a eu une plus forte résonnance, le grand public a pu s’en imprégner davantage et a pris conscience, par la même occasion, de la nécessité de la préserver.
Certes, cette biodiversité s’érode, et ce constat est effrayant mais nous devons rester confiants et positifs. Je crois beaucoup au potentiel des agences comme la nôtre pour accompagner les associations, les entreprises et les collectivités locales à mieux la protéger. Nous avons collecté toutes les connaissances existantes, maintenant, reste à les mettre en réseau et à identifier les priorités.
dd.com : Pour 2011, quelles sont les priorités ?
L. P. : Je m’inscris pleinement dans la continuité de l’important travail de mes prédécesseurs. Mes priorités, dorénavant, sont d’accentuer la sensibilisation et l’éducation. Pour que la population soit partie prenante, il est impératif que la cause soit bien plus connue… et reconnue.
dd.com : Vous dirigez également une école maternelle à Fontainebleau. Vous souhaitez donc accorder une importance particulière à l’éducation des jeunes sachant qu’on ne protège que ce que l’on connait ?
L. P. : Tout à fait ! J’ai en charge, quotidiennement, des enfants de 5 ans. C’est dès leur plus jeune âge, lorsqu’ils sont curieux et réceptifs, qu’il faut les sensibiliser. Malheureusement, je m’aperçois, lors des sorties que nous effectuons en forêt de Fontainebleau, qu’ils ne connaissent la forêt que d’un point de vue intellectuel, mais pas sensoriel. Je suis surprise par leurs réticences à s’approprier les lieux, à toucher les écorces, à toucher les sols. Il leur arrive même d’avoir certains réflexes de recul, par rapport à certains insectes qu’ils ne connaissent pas. Nous devons vraiment dépasser ces appréhensions mais nous ne pourrons le faire que si nous travaillons sur le long terme. Les activités que nous proposons à l’école sont souvent beaucoup trop ponctuelles.
Ainsi, l’Agence des Espaces verts, dont je suis vice-présidente, a mis en place un dispositif remarquable : les diplômes forestiers juniors. C’est exemplaire dans le sens où ce programme dure cinq ans. Ces enfants-là, demain, ne seront plus des adultes ignorants de la biodiversité, ils auront, au contraire, envie de la protéger et de la respecter.
dd.com : Vous êtes donc également vice-présidente de l’Agence régionale des espaces verts. Quelles sont ses attributions ?
L. P. : L’AEV, c’est l’agence en charge de la préservation du milieu par le biais d’acquisitions de foncier. Je souhaite renforcer encore la collaboration entre Natureparif et l’AEV pour faire en sorte que leur savoir-faire et leurs programmes exemplaires puissent servir à d’autres acteurs.
J’ai conscience, depuis que je suis conseillère régionale (EE-LV), que subsistent trop de cloisonnements. Prenez par exemple le Motif (Observatoire du livre et de l’écrit en Ile-de-France) : pourquoi ne pas travailler ensemble à l’édition d’un livre sur les mots de la biodiversité expliqués par les enfants ? Ce sont des chantiers que j’ai envie de lancer, avec la jeune et dynamique équipe de Natureparif.
dd.com : 2011 a été déclarée Année internationale de la Forêt. Comment Natureparif va-t-elle agir cette année pour préserver les forêts franciliennes ?
L. P. : Je dois vous avouer que ces Années dédiées me laissent toujours assez dubitative. Certes, elles ont le mérite de faire parler, de sensibiliser mais ensuite, une fois que l’année en question se termine, j’ai toujours peur que toutes les avancées concédées retombent dans l’oubli. Que 2011 soit l’Année internationale de la Forêt représente une excellente transition. A Natureparif, nous avons d’ores et déjà planifié un colloque intitulé « Comment concilier les différents usages de la forêt ? ». Le terme « concilier » est extrêmement important, certes il induit la notion de concurrence mais il est aussi un facteur d’apaisement.
Concernant la forêt, et notamment celle de Fontainebleau, que je connais particulièrement bien, le projet d’en faire un Parc national m’a un peu inquiété à l’origine. Elle est déjà très protégée, très réglementée et je craignais que les Franciliens ne s’y sentent plus chez eux. Pour m’y rendre très souvent, j’ai conscience qu’elle représente leur jardin, leur lieu privilégié d’évasion. C’est donc la raison pour laquelle il sera capital de mieux les éduquer et les sensibiliser à la préserver. On voit malheureusement dans les spots d’escalades que l’importante fréquentation endommage les sites.
(Note de greg des blocs: Je pense que les dégradations ne se limitent pas aux sites d'escalade mais à l'ensemble des sites rocheux et surtout, elles ne sont pas directement liées à notre pratique pour la majeure partie)
dd.com : Comment expliquez-vous le fait que l’Ile-de-France accueille de 7 à 33 % d’espèces de moins que les départements limitrophes ?
L. P. : L’urbanisation et la pression anthropique sont bien plus fortes qu’ailleurs. Nous craignons, et les indicateurs le montrent, que cet environnement moins accueillant pour la biodiversité ne le devienne aussi pour l’homme. Nous avons d’ailleurs très peur du « printemps silencieux ». Toutefois, loin de nous l’idée de plonger dans le catastrophisme, je suis une femme confiante, je ne pratique pas l’écologie punitive. C’est en tissant des liens avec tous les acteurs du territoire que nous pourrons agir. D’autant que les spécialistes parlent, dans la nature, d’un phénomène de résilience, rien n’est irréversible. Je m’en aperçois personnellement en Seine-et-Marne. Dans le Parc naturel régional du Gâtinais nous avons vu revenir certaines espèces du bocage, grâce au travail mené avec les agriculteurs et à la restauration des milieux.
dd.com : Pour 2011, quelles sont les priorités ?
L. P. : Je m’inscris pleinement dans la continuité de l’important travail de mes prédécesseurs. Mes priorités, dorénavant, sont d’accentuer la sensibilisation et l’éducation. Pour que la population soit partie prenante, il est impératif que la cause soit bien plus connue… et reconnue.
dd.com : Vous dirigez également une école maternelle à Fontainebleau. Vous souhaitez donc accorder une importance particulière à l’éducation des jeunes sachant qu’on ne protège que ce que l’on connait ?
L. P. : Tout à fait ! J’ai en charge, quotidiennement, des enfants de 5 ans. C’est dès leur plus jeune âge, lorsqu’ils sont curieux et réceptifs, qu’il faut les sensibiliser. Malheureusement, je m’aperçois, lors des sorties que nous effectuons en forêt de Fontainebleau, qu’ils ne connaissent la forêt que d’un point de vue intellectuel, mais pas sensoriel. Je suis surprise par leurs réticences à s’approprier les lieux, à toucher les écorces, à toucher les sols. Il leur arrive même d’avoir certains réflexes de recul, par rapport à certains insectes qu’ils ne connaissent pas. Nous devons vraiment dépasser ces appréhensions mais nous ne pourrons le faire que si nous travaillons sur le long terme. Les activités que nous proposons à l’école sont souvent beaucoup trop ponctuelles.
Ainsi, l’Agence des Espaces verts, dont je suis vice-présidente, a mis en place un dispositif remarquable : les diplômes forestiers juniors. C’est exemplaire dans le sens où ce programme dure cinq ans. Ces enfants-là, demain, ne seront plus des adultes ignorants de la biodiversité, ils auront, au contraire, envie de la protéger et de la respecter.
dd.com : Vous êtes donc également vice-présidente de l’Agence régionale des espaces verts. Quelles sont ses attributions ?
L. P. : L’AEV, c’est l’agence en charge de la préservation du milieu par le biais d’acquisitions de foncier. Je souhaite renforcer encore la collaboration entre Natureparif et l’AEV pour faire en sorte que leur savoir-faire et leurs programmes exemplaires puissent servir à d’autres acteurs.
J’ai conscience, depuis que je suis conseillère régionale (EE-LV), que subsistent trop de cloisonnements. Prenez par exemple le Motif (Observatoire du livre et de l’écrit en Ile-de-France) : pourquoi ne pas travailler ensemble à l’édition d’un livre sur les mots de la biodiversité expliqués par les enfants ? Ce sont des chantiers que j’ai envie de lancer, avec la jeune et dynamique équipe de Natureparif.
dd.com : 2011 a été déclarée Année internationale de la Forêt. Comment Natureparif va-t-elle agir cette année pour préserver les forêts franciliennes ?
L. P. : Je dois vous avouer que ces Années dédiées me laissent toujours assez dubitative. Certes, elles ont le mérite de faire parler, de sensibiliser mais ensuite, une fois que l’année en question se termine, j’ai toujours peur que toutes les avancées concédées retombent dans l’oubli. Que 2011 soit l’Année internationale de la Forêt représente une excellente transition. A Natureparif, nous avons d’ores et déjà planifié un colloque intitulé « Comment concilier les différents usages de la forêt ? ». Le terme « concilier » est extrêmement important, certes il induit la notion de concurrence mais il est aussi un facteur d’apaisement.
Concernant la forêt, et notamment celle de Fontainebleau, que je connais particulièrement bien, le projet d’en faire un Parc national m’a un peu inquiété à l’origine. Elle est déjà très protégée, très réglementée et je craignais que les Franciliens ne s’y sentent plus chez eux. Pour m’y rendre très souvent, j’ai conscience qu’elle représente leur jardin, leur lieu privilégié d’évasion. C’est donc la raison pour laquelle il sera capital de mieux les éduquer et les sensibiliser à la préserver. On voit malheureusement dans les spots d’escalades que l’importante fréquentation endommage les sites.
(Note de greg des blocs: Je pense que les dégradations ne se limitent pas aux sites d'escalade mais à l'ensemble des sites rocheux et surtout, elles ne sont pas directement liées à notre pratique pour la majeure partie)
dd.com : Comment expliquez-vous le fait que l’Ile-de-France accueille de 7 à 33 % d’espèces de moins que les départements limitrophes ?
L. P. : L’urbanisation et la pression anthropique sont bien plus fortes qu’ailleurs. Nous craignons, et les indicateurs le montrent, que cet environnement moins accueillant pour la biodiversité ne le devienne aussi pour l’homme. Nous avons d’ailleurs très peur du « printemps silencieux ». Toutefois, loin de nous l’idée de plonger dans le catastrophisme, je suis une femme confiante, je ne pratique pas l’écologie punitive. C’est en tissant des liens avec tous les acteurs du territoire que nous pourrons agir. D’autant que les spécialistes parlent, dans la nature, d’un phénomène de résilience, rien n’est irréversible. Je m’en aperçois personnellement en Seine-et-Marne. Dans le Parc naturel régional du Gâtinais nous avons vu revenir certaines espèces du bocage, grâce au travail mené avec les agriculteurs et à la restauration des milieux.
Les pesticides sont aussi un gros problème. Avec l’extension des surfaces agricoles, les zones humides ont disparu, et de nombreux micro-organismes vivants aussi. Nous travaillons aussi, en collaboration avec les Chambres d’agriculture, à l’évolution des mentalités des agriculteurs. Pour en avoir rencontré quelques-uns, je peux vous assurer qu’ils commencent à prendre conscience des dangers des pesticides. Je suis une femme de terrain, c’est avec le partage d’expériences que nous pourrons avancer.
dd.com : Vous êtes également conseillère régionale pour Europe Ecologie-Les Verts. Quelle est votre vision idéale de la région, en termes de biodiversité et d’environnement ?
L. P. : Les clés, pour moi, sont l’éducation, le dialogue, l’interaction. Les gens commencent à prendre conscience que la biodiversité n’est pas une simple composante de l’environnement mais qu’elle a un véritable impact sur leur vie personnelle. Des sommets tels que Nagoya participent aussi à cette prise de conscience, cette communication. Tout comme la mise en place, avec le soutien de la Région, de parcs naturels régionaux, pour protéger des espaces moins emblématiques que la forêt de Fontainebleau par exemple. Les médias ont également un rôle prépondérant à jouer : il doit y avoir une meilleure visibilité des métiers qui touchent à la terre, à la nature, dans les médias. Je peux vous dire que j’ai été stupéfaite de voir, en me rendant dans un lycée agricole, que certaines formations ne trouvent pas de candidats. La clé viendra de l’éducation, à tous les niveaux."
L. P. : Les clés, pour moi, sont l’éducation, le dialogue, l’interaction. Les gens commencent à prendre conscience que la biodiversité n’est pas une simple composante de l’environnement mais qu’elle a un véritable impact sur leur vie personnelle. Des sommets tels que Nagoya participent aussi à cette prise de conscience, cette communication. Tout comme la mise en place, avec le soutien de la Région, de parcs naturels régionaux, pour protéger des espaces moins emblématiques que la forêt de Fontainebleau par exemple. Les médias ont également un rôle prépondérant à jouer : il doit y avoir une meilleure visibilité des métiers qui touchent à la terre, à la nature, dans les médias. Je peux vous dire que j’ai été stupéfaite de voir, en me rendant dans un lycée agricole, que certaines formations ne trouvent pas de candidats. La clé viendra de l’éducation, à tous les niveaux."
Propos recueillis par Albane Wurtz
Bonjour,
RépondreSupprimerUn grand bravo(!), pour quelqu'un qui dit vouloir défendre la biodiversité, d'avoir utilisé une photo du phytolaque, qui la détruit dans toutes les forêts d'europe, et surtout celle de Fontainebleau...Eduquer les jeunes enfants ne devrait pas être confié à des élus ou futurs élus dont les élucubrations sont très approximatives , voire douteuses .... Qu'on se le dise !!!!
Bonjour et merci d'avoir remarqué cette photo. je suis content que tu partages cette opinion au sujet du raisin d'Amérique et suis sûr que tu participes toi aussi à son arrachage (avec des gants comme nous le signalons ailleurs dans le blog !)
RépondreSupprimerJe ne comprends pas pourquoi tout le monde s'accorde pour vouloir protéger cette forêt mais que les moyens d'action sur le terrain restent ceux de bénévoles...