Les coupes rases c'est pas bientôt fini ?

Vous le savez, à la TL²Bleau, les coupes rases de l'ONF on n'aime vraiment pas ça ! Cela fait des années que cela dure et que les associations réclament un traitement sylvicole plus doux.
Certes, la sylviculture est un métier très complexe et notre expertise ne vaut certainement rien face à celle de nos ingénieurs forestiers. Nous savons aussi que les forestiers, hommes et femmes de terrain, sont des amoureux de nature et réalisent parfois des coupes à contre coeur.
Nous avons dans le passé dénoncé à de très nombreuses reprises les évolutions  imposées à cet etablissement public par son administration de tutelle (le Ministère de l'Agriculture et des Forêts) et les gouvernements successifs qui ne cessent de réformer la filière bois pour la rendre de plus en plus productive au prétexte que le bois est une énergie renouvelable ! Si les choses bougent pas mal de ce côté (nous en parlons d'avantage sur la TL²B + ) avec de nouvelles réformes du code forestier (article sur l'aspect pénale), à l'heure ou l'ONF Fontainebleau s'attaque à l'étude nécessaire à l'élaboration du nouveau Plan d'aménagement forestier (pour 2015), de nombreux usagers (grimpeurs, photographes, naturalistes...) s'inquiètent de la reprise des grandes coupes rases mais surtout de la jeunesse des arbres abattus !


Nous n'allons pas revenir ici sur la sylviculture, le pourquoi comment des coupes, les combats d'hier... (Pour ceux que le sujet intéresse, rendez vous sur notre page ) ni même sur le nettoyage des 10 ha incendiés au Rocher Cailleau dont nous n'avons que trop parlé mais reprendre juste 2 articles d'amis photographes et naturalistes qui s'intérrogent à raison sur les grandes coupes à blanc et le devenir de notre forêt.

La forêt de Fontainebleau, dans son visage actuel, n'a plus rien de très naturel.
Elle est le fruit du travail des hommes depuis des siècles. Quand elle était royale, elle servait aux bons plaisirs de nos seigneurs et donc au maintien de la plus forte densité possible de gibier. Vient ensuite les besoins engendrés par le développement économique de la région au XIXe et la nécessité de gérer la ressource en bois. C'est de là que date bon nombre de changements de notre paysage avec notamment l'introduction des résineux qui, en moins d'un siècle, ont colonisés la plus part des vides et notamment les arrides pignons rocheux de Franchard, Apremont et Trois pignons.

Bref, on ne va pas crier aux loups à chaque fois qu'un forestier coupe des arbres : c'est normal. Ce qui l'est déjà un peu moins, à nos yeux, c'est la méthode employée, le volume abattu, le choix des essences et l'âge d'exploitation de certaines parcelles.


Une centaine d'années sépare ces

images  de la Roche des trois Pignons... ça pousse !



Tous les vendredi dans Direct Matin, l'ONF tente de lutter contre les idées reçues
Une grande opération séduction mais qui est parfois en contradiction avec la réalité sur le terrain...


Après les polémiques qui accompagnèrent l'élaboration du dernier plan d'aménagement et sa révision, il nous semblait que l'ONF était sur la bonne voie. Ainsi, l'engagement avait été pris que les coupes rases de plusieurs ha se feraient de moins en moins nombreuses, que des bouquets d'arbres vieillissants seraient plus nombreux pour permettre le maintien d'une faune remarquable importante, fragile et menacée, etc. On s'était même pris à rêver de coupes successives étalées sur 30 ans permettant une régénération naturelle et de belles futaies paysagées avec des arbres de tranches d'âge différentes.

Nous avons à plusieurs reprises hurlé contre ces coupes rases, notamment depuis leur reprise en 2007. Passe encore pour le massacre au Rocher Fourceau (nettoyage après incendie), mais en mai 2011, les coupes nous avaient une nouvelle fois conduit à pousser  un cri d'alarme. Et ce d'autant plus que certains naturalistes hauts placés soutiennent l'ONF dans sa politique contradictoire d'éradication du hêtre au mépris de la biodiversité.

 Dans ses communications (que nous relayons bien volontiers), l'ONF affirme encore exploiter durablement la forêt. Elle indique respecter les cycles de vie des arbres (au moins 200 ans pour un chêne...). Pour autant, à la vue des coupes qui se pratiquent actuellement à Bleau, on est en droit de s'interroger sur l'avenir de nos futaies.

Nos enfants pourront-ils s'émerveiller devant des arbres multi-centenaires ? 
Nos enfants connaîtront-ils les joies de l'ombre en été sous une hêtraie et ses magnifiques couleurs à l'automne ?
Nos enfants connaîtront-ils autre chose qu'une futaie uniforme de manches à balai ?



Plus du tiers de la forêt domaniale de Fontainebleau est dévolue à son exploitation sylvicole. C'est une nécessité tant économique qu'écologique. Pourtant, l'idée d'erradiquer le hêtre (essence quasi dominante dans les RBI dont nous parlions ici) ou celle de justifier les coupes rases par la sécheresse de ces dernières années nous paraîssent plus que contestable, en tous cas, elles ne laissent aucune chance à une évolution naturelle (et à ses aléas). Qu'est-ce que 7 années de sécheresse dans la vie d'un chêne ?

Bref, nous on n'aime pas ce que l'on voit en ce moment dès que l'on s'enfonce un peu dans la forêt !

Ainsi, notre ami Jean Paul, sur son site Photonaturefontainebleau nous alertait une nouvelle fois au mois de mars sur la coupe de très jeunes chênes le long de la route de Bourgogne. Ses photos nous montrent des dizaines de troncs de chêne de 25 à 35 cm de diamètre ce qui est très loin d'un diamètre de chêne de 200 ans. Une coupe d'éclaircie nous dira t'on ?
Dans les commentaires de l'article (dont sont issues les 2 photos ci-dessous) nous avions longuement échangé avec un autre ami, Gaëtan Chetaille, formateur dans Centre Régional de la Propriété Forestière, sur la sylviculture moderne. Encore une fois, nous ne sommes pas contre le développement de la filière bois mais souhaitons simplement que l'ONF et les quelques 10 millions d'hectares qu'il gère soient résoluement et rééllement tournés vers la maintien de la biodiversité et l'accueil du public. 





Il y a quelques jours, c'est un autre photographe naturaliste remarquable qui nous alertait sur une très grande coupe rase visant cette fois à l'éradication du hêtre. En effet, Nicolas Flory qui aime à surveiller le niveau des mares est tombé sur cette coupe de la PF n°776 (non loin du rocher  Milly). Là encore, les images sont là aussi assez heurtantes (dont sont issues les 2 photos ci-dessous) !



Photos Nicolas Flory, PF 776 avril 2013




Un survol de la forêt ne laisse planer aucun doute sur son exploitation, les vides et le visage futur de certaines parcelles et ce n'est pas celui que l'on souhaite pour ce qui fut l'une des plus belles forêts de France.

Vue de ciel depuis Google




Photo de Daniel Prunier

Voilà donc ce à quoi ressembleront les forêt de demain, un parfait alignement de manches à balais dont l'écartement est calculé pour permettre la mécanisation de la coupe. Et voilà ce que nous ne voulons pas à Bleau. On a beau être défavorable au projet de PN à Bleau (pour les raisons que nous développons ici), y'a des fois où on serait presque tenté !

MISE A JOUR DU 22 avril

Nos amis de l'ONF Fontainebleau, suite à la parution de cet article , nous ont adressé le message suivant portant sur la partie de la coupe rase de la parcelle 776 :

j'ai bien pris connaissance de votre publication du vendredi 19 avril sur votre blog concernant certaines interventions sylvicoles et plus particulièrement celle située sur la parcelle 776 de la forêt domaniale de Fontainebleau.

Cette coupe a été réalisée dans un but de transformation aux fins de réintroduire du chêne dans un canton où il est en voie de disparition, sous l'effet envahissant du hêtre (faux climax : dépérissement des hêtres en limite de leur aire compte tenu des évolutions climatiques et reconquête par les pins) et de l'enrésinement naturel.Ici, notre souhait est donc de réintroduire du chêne, a priori mieux adapté que le hêtre, pour maintenir une continuité feuillue entre deux massifs (feuillus !) : le plateau des Grands Feuillards et le Mont Girard/Chêne Brulé, l’ensemble étant sinon cerné par des peuplements résineux : Rocher de Milly et Baraque à Guinet au sud, gorges de Franchard au nord, gorges du Houx et gorges aux Merisiers (bien mal nommée...) à l'est, rochers des Sablons et de Corne-Biche à l'ouest).

La coupe de la parcelle 776 a été réalisée en application de l'actuel document d'aménagement forestier. Les hêtres existants étaient partiellement dépérissants et majoritairement rougis à cœur comme en atteste la physionomie des bois exploités (cf vos photos) et aussi les nombreux arbres aux branches desséchées dans les peuplements voisins.

Malgré l'impact réel sur le paysage, l'exploitation a été conduite de manière soignée en respectant scrupuleusement le cahier des clauses techniques ainsi que les cloisonnements qui visent à ne pas tasser les sols.

Par ailleurs, nous conduisons une réflexion interne à l'établissement pour étudier d'autres modalités de renouvellement (moins perturbantes pour les paysages, techniques sylvicoles adaptées) de ces parcelles à transformer. C'est en effet notamment l'objet du projet " forêts périurbaines " lancé, en 2012, par notre direction territoriale. Dans cette perspective, cette parcelle fera l'objet de plusieurs modalités de plantations dont une sous abri dans sa périphérie.

Quant à notre ami Jean Paul, il y a bien longtemps qu'il ne croit plus au discours de l'office. Il le redit dans un nouvel article à propos notamment de la nécessaire conservation des bois morts et d'une gestion pseudo durable qui n'empêche pas (par exemple)l'ONF de programmer la coupe d'un arbre abritant un nid de pic !

Mise à jour estivale :
Nos amis du Parisien nous ont interrogé sur cette coupe... c'est à lire dans cet article
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